Extrait de La Belgique Apicole, 22(9), 1958, p 237-238 Avec leur permission. |
Article du Dr Hector Wallon, MD Bruxelles, Belgique |
Depuis l’apparition et la généralisation des ruches à cadres — ruches mobilistes — on s’est aperçu que l’essaim est nuisible à la récolte.
Au temps où l’on étouffait les colonies pour récolter le miel, un essaim était bien venu puisqu’il remplaçait une ruchée que l’on supprimerait. Plus il était précoce, mieux il était apprécié : « essaim de mai vaut vache à lait », tel était le dicton. Avec nos ruches actuelles, dont la capacité dépasse de beaucoup celle d’un panier, il en va tout autrement et chacun sait qu’un essaim — surtout précoce — emporte avec lui tout espoir de récolte.
On essaye donc de réduire le dommage: le plus souvent, on remet l’essaim à la souche, c’est-à-dire que, le soir ou le lendemain, on le verse sur le dessus des cadres. Cette pratique n’est pas toujours couronnée de succès, surtout si on n’a pas enlevé la vieille reine et détruit les cellules royales en surnombre. Il arrive que l’essaim reparte et, cette fois, se perde.
On s’est donc efforcé d’enrayer l’essaimage. Diverses méthodes ont été préconisées. Généralement, les abeilles essaiment quand la ruche est surpeuplée. Cependant, j’ai vu essaimer des colonies disposant encore de beaucoup de place. L’agrandissement progressif du nid à couvain se révèle assez souvent inefficace.
D’autres théories sont apparues. On préconisait de mettre les colonies à l’abri des rayons du soleil afin d’éviter un excès de chaleur à l’intérieur des ruches. J’ai placé mes colonies à l’ombre de grands arbres touffus : l’essaimage les réduisait de moitié chaque année.
On a recommandé aussi de détruire les cellules maternelles tous les huit jours pendant la saison des essaims. Je n’ai jamais eu le courage de le faire régulièrement et des alvéoles royaux qui étaient bien dissimulés, ont dû, souvent, échapper à mes recherches.
Pour favoriser l’introduction de reines étrangères dans le pays, on a tiré parti du fait que certaines races sont moins essaimeuses que d’autres. On affirmait que les reines italiennes n’essaimaient pas l’année qui suit leur naissance : on attribuait aux caucasiennes et aux piémontaises peu de propension à l’essaimage. Les carnioliennes étaient considérées comme une race très prolifique mais fort essaimeuse.
Tout cela paraissait vrai dans les faits observés, mais ceux-ci n’étaient pas assez nombreux et toutes les généralisations tentées se révélèrent peu intéressantes. Ceci fut mon cas avec un apier de 15 à 20 ruches. Pendant dix ans, seule, une colonie qui n’essaima pas donna une récolte chaque année.
C’est de cette souche que j’ai peuplé tout mon rucher. Cela m’a permis d’établir le non-essaimage héréditaire, c’est-à-dire l’anecballie.
En 1937, j’ai publié un premier rapport. La conclusion en était: En tout premier lieu, pour ne pas récolter d’essaim, il ne faut pas semer l’essaim. En d’autres termes, il ne faut pas multiplier les colonies essaimeuses.
Cette conclusion est généralement acceptée et dans la plupart des périodiques belges et étrangers on le répand : le Frère Adam lui-même déclare que l’anecballie est une nécessité. Il s’agit donc bien d’une méthode qui mérite d’être généralisée.
Le maintien de l’anecballie, dans un rucher, présente quelques difficultés et nécessite une surveillance constante. Il est évident qu’une reine de souche anecballique est, comme toutes les reines, soumise aux hasards de la fécondation. Mes abeilles pratiquent presque toujours l’adelpho-fécondation lors d’un renouvellement, mais il n’en est pas de même pour les jeunes reines nées en nucleus. Ceci est un premier obstacle qu’il faut vaincre en supprimant impitoyablement toute reine qui fait retour à l’essaimage, le plus souvent par suite de croisement.
Quand on veut renouveler une reine, il faut introduire, à sa place, la reine de la meilleure des colonies anecballiques. Cette opération doit se faire vers la fin de la saison. La colonie rendue orpheline gardera ses bourdons alors que le massacre des mâles aura été effectué dans les autres ruchées. Ceci augmente les chances de fécondation anecballique.
Il y a d’autres difficultés à vaincre lorsqu’on veut créer une lignée anecballique. La première est de rechercher la colonie qui servira de point de départ. Il faut de nombreuses années d’observation d’une souche pour arriver à la quasi-certitude de posséder une abeille qui n’essaime pas ou presque pas. Cette abeille n’existe pas dans le commerce, car une de ses qualités est d’édifier très peu de cellules maternelles. Elle ne peut donc que difficilement se prêter à l’industrie des éleveurs de reines.
Il est aussi difficile, pour un amateur, d’élever des reines anecballiques en rucher pour satisfaire des amis ou des connaissances. Aucune garantie de bonne fécondation n’est assurée. C’est par des ententes locales que l’on pourra arriver à supprimer les souches par trop essaimeuses.
Voici les préceptes qui, bien suivis et soigneusement appliqués, donneront les meilleurs résultats dans notre pays.
M. Fey est parvenu à créer, à Uccle, un apier anecballique en partant de ma lignée. Chez lui, comme chez moi, les essaims sont une rareté.
M. Delval et moi avons fait une expérience intéressante. Il a élevé des reines que nous avons fait féconder dans mon apier : deux colonies constituées au moyen de ces reines n’ont pas essaimé depuis cinq ans. On peut donc croiser deux souches anecballiques.
Extrait de La Belgique Apicole, 22(9), 1958, p 237-238 Avec leur permission. |
Article du Dr Hector Wallon, MD Bruxelles, Belgique |