L'élevage des faux-bourdons est un facteur souvent sous-estimé. Les mâles doivent bénéficier des mêmes soins que les reines à élever. Si pendant leur production, les colonies s'affaiblissent, les larves seront mal nourries et les mâles resteront bien chétifs et même stériles. Ceci se remarque particulièrement bien lors de la récolte du sperme pour l'insémination artificielle.
En automne, nous plaçons des cadres avec des cellules de mâles dans les colonies dont la lignée a été choisie pour la production des faux-bourdons.
24 jours s'écoulent de la ponte à l'éclosion, puis 12 à 15 jours sont nécessaires pour le développement de la maturité. Ce délai doit être pris en compte, car il ne sert à rien de débuter trop tôt l'élevage des reines si les mâles ne sont pas disponibles pour la fécondation. Par mauvais temps, le nourrissement est indispensable, surtout en fin de saison. Quand les mâles font défaut, on arrête l'élevage. Juste avant l'expulsion des faux-bourdons, nous retirons les cadres de mâles des colonies de certaines lignées. Accompagnés de deux cadres de couvain garnis de leurs abeilles, ils sont placés dans des ruches près de la station de fécondation. Neuf jours plus tard, les cellules royales sont détruites. Faute de ne plus pouvoir produire une reine, les ouvrières gardent ainsi pendant environ 4 semaines des mâles bien soignés. On arrive ainsi à allonger la période de fécondation. Dans ces colonies à mâles, la nourriture ouverte, si possible dans des cellules de mâles, doit être continuellement disponible.
On constate que les colonies gardent les mâles plus longtemps si l'apport en pollen est important. L'ensemencement d'une parcelle de quelques ares, avec de la moutarde jaune ou d'autres plantes qui sont de bons fournisseurs de pollen (phacélie, bourrache, mélilot) avant la période du massacre des mâles donne d'excellents résultats.
Lors du choix des lignées, il importe surtout d'éviter toute consanguinité entre les mâles et les reines. La combinaison des lignées côté mâle et côté femelle est d'autre part décisive pour le comportement et la qualité des descendants. Plus de 60 colonies de mâles de même lignée dominent les alentours de ma station de fécondation, ceci afin de garantir une présence abondante et par conséquent des fécondations suffisamment pures. L'effet est encore renforcé par les mâles de mes collègues des environs proches qui élèvent la même race.
Il va sans dire que surtout en élevage il importe de limiter strictement, par un traitement adéquat l'infestation par le varroa.
Les cellules de mâles sont 8,6 % fois plus parasitées que les cellules d'ouvrières (Schultz 1984). Une étude du Dr Petra Schneider (1987) sur l'influence du varroa pendant le stade nymphal montre que les ravages dévastateurs sont les plus importants chez les mâles.
Elle a étudié l'action du varroa, de son nombre par cellule pendant le stade nymphal, sur la durée de séjour des mâles dans la colonie et sur le nombre de spermatozoïdes. Trois populations sont envisagées : P0 = colonies témoin sans varroa; P1 colonies où on trouve de 1 à 3 varroas par cellule de mâle et P2 où on trouve plus de 3 varroas par cellule.
Les glandes hypopharyngiennes des ouvrières ne se développent dans le groupe P1 qu'à 86 % et dans le groupe P2 qu'à 68 %. La qualité et la quantité des substances protéiques et lipidiques diminuent nettement. Le nourrissement des larves d'ouvrières et de mâles n'est que médiocrement assuré.