On dit que la nature est le garant de la meilleure sélection. Est-ce bien vrai en général et particulièrement en apiculture ?
Les colonies paresseuses ayant un rendement insuffisant, meurent de faim. De même les colonies qui ont récolté à l’excès et, faute de place n’ont donc pas suffisamment élevé d’abeilles hivernales, sont éliminées. Les colonies les plus agressives sont celles qui se défendent le mieux contre leurs ennemis et sont donc privilégiées par rapport à celles qui sont plus douces. Les colonies essaimeuses se reproduisent en grand nombre. Les non-essaimeuses ne se reproduisent pas. Durant des générations, la reine est remplacée sans essaimage dans ces dernières colonies anecballiques. Très souvent, la fille partage le nid avec sa mère. Mais ces colonies risquent de disparaître s’il s’avère que la fécondation échoue, ce qui est souvent le cas, car ceci se passe généralement en fin de saison.
On dit que l’abeille ordinaire est la mieux adaptée. Ceci serait plus vrai si l’environnement dans lequel elle doit exister n’avait pas changé. Mais dans beaucoup de régions, l’urbanisme et les techniques agricoles ont bouleversé le milieu naturel au cours de ces dernières années. Souvent il ne reste plus que des miellées précoces qu’il s’agit d’exploiter pleinement sans quoi les hausses resteront vides pour toute l’année. Souvent l’abeille du pays, non-sélectionnée et non adaptée aux nouvelles conditions offertes par le milieu environnant, n’est pas opérationnelle au moment de la récolte; les ruches ne seront suffisamment peuplées qu’en fin de saison.
Il y a des races locales qui présentent des caractéristiques de grande valeur qu’il faut sauvegarder pour l’avenir.
L’insémination instrumentale viendra en aide en garantissant la fécondation avec les mâles appartenant à la même race. La création de banques de sperme, qu’on espère bientôt être réalisable, sera certainement une aide appréciable pour la conservation à l’état pur de races de provenances diverses.
Dans les ruchers à bon rendement, un grand soin est donné à la sélection de reines destinées à l’élevage, à la sélection de reines servant dans les ruches de production ainsi qu’au renouvellement de ces reines tous les deux ans.
Si nous comparons le sanglier et le porc domestique et si nous considérons le cas de la vache dont la production laitière a doublé en 30 ans avec pratiquement le même apport en nourriture, alors on ne peut nier les résultats possibles de la sélection. En principe, des résultats semblables sont possibles en apiculture.
Le premier critère de la sélection en apiculture est le rendement en miel.
En second lieu, on sélectionnera une abeille qui ne demandera qu’un minimum d’interventions, car dans un rucher rentable, le nombre de ruches exploitées est sensiblement égal au nombre de ruches qu’on arrive à conduire durant la période d’essaimage. On sait qu’il y a des races ou des lignées qui, chaque année, poussent inéluctablement à l’essaimage, et ceci même en l’absence de surpopulation. J’ai fait l’expérience de certaines lignées de la race carniolienne (toutes les carnioliennes n’ont pas cette propriété !) dans lesquelles la reine essaime tout juste après avoir pondu dans les cellules royales. Ces colonies exigent des interventions techniques compliquées et conduisent à une surcharge de travail.
A l’opposé, dans d’autres races, les cellules royales operculées sont même éliminées par les ouvrières lorsque nous ajoutons simplement une hausse supplémentaire. Dans ces mêmes races, même en présence des cellules royales, la reine n’arrête pas de pondre, ce qui facilite la restauration de l’harmonie e la colonie. Dans un rucher moderne, les colonies n’auront donc qu’une faible tendance à l’essaimage.
3me critère : La résistance aux maladies. Ici, la nature sélectionne réellement : les plus vulnérables meurent. Les apiculteurs œuvrent toutefois contre la nature, en appliquant des médications qui souvent ne sont pas nécessaires. Les traitements prophylactiques, non nécessaires, sont à proscrire. La varroase, toutefois, fait exception : le traitement des colonies est encore obligatoire. Les maladies du couvain pourraient être écartées par un bon comportement hygiénique (Marla Spivak, 2001, pdf).
4me critère : Tous les apiculteurs souhaitent vivre en bonne amitié avec leurs voisins. Pour cela, nos abeilles doivent avoir bon caractère. De même le travail de l’apiculteur est largement facilité s’il élève une abeille qui tient bien le cadre. Il est bien plus agréable de travailler sans voile ni gants et en n’étant malgré cela pas "criblé" de piqûres douloureuses.
Il faut toutefois se rendre compte que des compromis doivent être faits. Toutes les aptitudes souhaitées sont rarement regroupées dans une seule reine ou une seule colonie.