L’anecballie

Extrait de La Belgique Apicole,
16(1-2), 1952, p 12-13,
avec leur permission.
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[Articles originaux de H. Wallon "1" et "2"]
Article de R. LIETAR
Belgique

Il est généralement admis que l’hérédité ne change pas tant que n’intervient pas dans les gènes de l’un ou l’autre des descendants, une perturbation qui sera cause, tantôt de la disparition d’un caractère de la race, tantôt de l’apparition d’un caractère nouveau. Cette anomalie peut être heureuse et apporter dans le patrimoine de l’espèce une arme supplémentaire à la défense de la pérennité; elle peut aussi être malheureuse et rendra le nouvel être incapable de naître, de vivre ou de subsister par ses propres moyens.

Bonnes ou mauvaises, les perturbations, occasionnées par les gènes, soit par le hasard, soit par la main de l’homme, car il est allé jusque là, provoquent l’apparition de propriétés extraordinaires que les biologistes appellent mutations, et qui sont héréditaires. Il en résulte la création d’une nouvelle race.

D’autres facteurs apportés par le milieu dans lequel les êtres sont appelés à se développer et à vivre, opèrent parfois, sur leur comportement naturel ou même sur leur structure, des transformations telles que la filiation se différencie nettement des parents. On pourrait croire, à priori, que la race a réellement changé ; il n’en est rien ! Les caractères acquis par l’influence du milieu ne se reproduiront pas dans la descendance : ils ne sont pas héréditaires.

Dans un article publié en novembre dernier par « la Belgique Apicole », C. écrivait en dernier alinéa : « L’anecballie n’est pas une utopie ». Bon nombre d’apiculteurs commencent, heureusement, à s’en apercevoir; mais nous pouvons dire plus et nous avancer davantage.

Il y a un quart de siècle, le docteur Hector WALLON, de Bruxelles, découvrit dans son abeiller une population n’essaimant pas. Pour désigner cette qualité, il inventa le mot « anecballie » et depuis de nombreuses années, il s’est appliqué à reproduire cette abeille anecballique dont son rucher est exclusivement peuplé à l’heure actuelle. La constance de ce caractère dans les générations successives prouve à suffisance que l’anecballie est héréditaire et qu’il s’agit bien là, comme l’affirme le docteur WALLON dans sa communication à la Société Royale Zoologique de Bruxelles en 1950, d’une variation spontanée héréditaire, apparaissant sporadiquement dans les apiers et à laquelle on n’avait pas prêté attention.

Il est en effet probable que de tels mutants ont existé ça et là dans nombre de ruchers, sans que l’apiculteur s’en soit aperçu ou s’en soit soucié.

Dans le cas présent, la mutation a un caractère létal pour la race; dans la nature, l’abeille anecballique doit disparaître, car elle dépend de l’homme pour subsister. A ce titre, elle entre plus intimement que ses sœurs dans le cadre des animaux domestiques; de ceux dont l’humanité a protégé l’espèce parce que le caractère apparu spontanément comble ses désirs ou sert ses desseins : il en est ainsi de la poule qui ne couve plus et qui, presque journellement pond son œuf et de l’oie domestiquée depuis la plus haute antiquité, incapable de prendre son vol, mais plantureuse à point et dodue à souhait. Ainsi la plupart des sujets qui nous entourent ont été distingués pour leur rapport, leur ampleur, leur beauté, en un mot, à cause de leurs qualités utilitaires pour l’homme. Si ces animaux devaient un jour se retrouver devant leurs ennemis naturels, ils seraient absolument incapables de se défendre et se verraient voués à l’extermination, les uns par manque de reproductivité, les autres par leur pesanteur ou la perte d’une capacité inhérente à l’espèce ancestrale : certains ne volent plus, d’autres ne peuvent même plus courir, l’abeille n’essaime plus ... Ce sont des monstres.

L’homme les a maintenus précisément en vue du profit qu’il trouve dans l’exploitation de leur monstruosité, il en fait des sujets de rapport ... Telle est l’abeille anecballique qui, n’en doutons pas, finira par devenir l’hôte exclusif de nos ruchers !

A cette occasion. il n’était pas peut-être inutile de rappeler que nous avons aussi nos chercheurs et que le Dr Hector WALLON a bien mérité de l’Apiculture.

Extrait de La Belgique Apicole,
16(1-2), 1952, p 12-13,
avec leur permission.
[Suite : second article de R. Lietar]
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[Articles originaux de H. Wallon "1" et "2"]
Article de R. LIETAR
Belgique